La médersa Ben Youssef

Véritable joyau d’architecture arabo-andalouse, la médersa Ben Youssef fut édifiée par le sultan Abdellah El Ghalib en vue d’embellir Marrakech, alors capitale du royaume. Il en acheva la construction en 1565 et lui donna le nom du sultan almoravide Ali Ben Youssef, en hommage à la dynastie qui fonda la Ville Rouge.
La mosquée voisine et tout le quartier portent également son nom. Au détour d’une ruelle, se dresse l’imposante coupole qui marque l’entrée de la médersa. L’inscription visible sur le linteau de la porte s’adresse aux visiteurs : « J’ai été édifiée pour les sciences et la prière » précise-t-elle en partie. L’atmosphère de quiétude et de recueillement flotte encore dans les murs de l’édifice.
De longs couloirs épurés courent autour du patio principal et s’ouvrent sur des courettes surplombées par des balustrades de bois. Le plâtre recouvre les parois des vestibules. Décors floraux, géométriques, stalactites, pommes de pin et calligraphie de style coufique se dessinent sur les murs.
132 minuscules chambres se déploient autour des vestibules et des balustrades. Jadis destinées à accueillir les notables, les pièces les plus spacieuses possèdent des fenêtres ornées de moucharabiehs qui donnent sur le patio principal. Cette vaste cour rectangulaire percée d’un bassin carrelé vaut à elle seule le détour. Des dentelles de plâtre et de cèdre ornent les murs, tandis que d’imposants piliers couverts de zelliges, de céramique noire et de bois sculpté soutiennent l’étage de l’édifice. Au sol, la lumière du soleil se reflète sur le marbre de Callare. On raconte qu’à l’époque de la construction, les Sâadiens échangèrent du sucre contre ce marbre. Les zelliges qui courent sur les murs offrent aux visiteurs un somptueux tableau de mosaïques colorées. Les petits carreaux d’argile émaillée forment des rosaces aux tons bleus, verts, jaunes, blancs, bruns et noirs. De l’autre côté du patio se tient la salle de prière avec son mirhab tourné vers la Mecque, ses huit colonnes et sa coupole de cèdre. C’est dans cette pièce que les étudiants se recueillaient ensemble. Qualité des matériaux, finesse des ornements... la richesse architecturale de l’édifice témoigne de son passé flamboyant.
Rappelons qu’au temps de sa splendeur, la notoriété de la médersa dépassait les frontières, et elle pouvait accueillir jusqu’à trois cents résidents... Ceux-ci affluaient de partout pour intégrer le prestigieux établissement et vivre dans la plus totale sobriété, tout en respectant les conditions d’admission. Les étudiants venus de la campagne devaient d’abord suivre une éducation de base dans une médersa rurale, avant de solliciter l’entrée à la médersa Ben Youssef. Tous devaient avoir au moins 20 ans, lire le hizb matin et soir, et assister de manière assidue aux cours qui se déroulaient à la mosquée voisine. Pour pouvoir rester, ils devaient se montrer rigoureux. Si au bout de dix ans leurs aptitudes n’étaient pas reconnues, ils étaient expulsés. Sérieux, mais aussi simplicité et dépouillement étaient le lot quotidien des étudiants. Ils vivaient de peu de chose. À l’étage de l’édifice, leurs effets ont été reconstitués et mis en scène pour les visiteurs. Chaque résident disposait d’un écritoire de bois, d’encriers, de calames (plumes de roseaux) et de manuscrits tels que le Coran, le Hadith et des manuels d’étude. Ils s’éclairaient à la lueur de bougies et de lampes à huile.On imagine aisément la douceur des lumières d’autrefois danser sur ces murs plâtrés de blanc. On imagine aussi le fumet des tagines et des braseros qui s’immisçait dans les couloirs lorsque les étudiants préparaient les repas... La médersa leur fournissait de quoi se nourrir et un pain par jour. Les élèves possédaient également tout le nécessaire pour le thé, une cruche d’eau et des potiches à provisions qu’ils remplissaient de dattes et de fruits secs. Une peau de mouton faisait office de tapis de prière et ils dormaient sur des nattes. Les fonds des Habous permettaient d’entretenir l’établissement et d’assurer gîte et couvert aux résidents.
Au fil des ans, la médersa Ben Yousssef a incontestablement contribué à la diffusion du savoir. Elle n’accueille plus d’étudiants depuis 1956, mais fait désormais partie du patrimoine culturel de la ville. En 1999, le ministère de la Culture a confié à la fondation Omar Benjelloun la restauration et la gestion du monument. Les travaux ont duré jusqu’en 2002. Depuis, la médersa attire de plus en plus de touristes, venus découvrir ce superbe édifice empreint d’un passé séculaire.

Médersa Ben Youssef
Près de la mosquée Ben Youssef, sortie nord des souks
Ouvert tous les jours de 9h à 18h30
Tarif : 50 Dh - Tél. : 05 24 44 18 93